3 - Enrochement des plages

L’enrochement des plages
ne sert qu’à dilapider les deniers publics

Je lis que d'opportuns remédiateurs des méfaits du réchauffement climatique proposent à la commune de Tregastell d'assurer l'avenir des résidences imprudemment construites sur le surplomb friable de la Grève rose : un projet de 600 000 E d’enrochement de la grève, dont les contribuables bretons seraient les principaux créanciers, puisque la municipalité envisagerait déjà un financement par la Région et par l’État... et semblerait exclure la mise à contribution des premiers intéressés !

On se moque du monde :
Aucun enrochement d'un littoral sableux ne peut résister durablement à l'assaut des tempêtes et des marées conjuguées, alors que la montée du niveau des mers est désormais irréversible.
Connaissez-vous l'histoire de la plage de Lehan-Lechiagat en Pays bigouden ?
Enfant, j'ai connu cette grève, longue, large, sableuse et riche en coquillages multicolores... Il y a quelques années, la municipalité de Lechiagat-Treffiagat décida d'en "protéger" la partie occidentale, proche du bourg, par un enrochement comme celui qui est proposé à Tregastell : la modification et le renforcement des courants de ressac provoquèrent alors, à l'est de cet ouvrage, un creusement rapide de la plage, mettant à nu la tourbe du marais, qu’un cordon dunaire sépare encore de l’estran. Ce fut alors au tour de la dune d'être attaquée par les vagues. Cet hiver, elle a, par endroits, été réduite au tiers de son épaisseur d'il y a 10 ans ; les habitations qu'elle protégeait de la mer sont désormais menacées. L'enrochement, lui, tient encore... en attendant que, bientôt, le creusement de la dune ne vienne le contourner à l'est, ouvrant la voie à la mer vers le marais... et vers les maisons récemment construites sur le domaine inondable.
Comme l'écrit Serge Suanez, professeur en géomorphologie littorale à l'Institut universitaire européen de la Mer à Brest : " Mettre des enrochements sans s'occuper de la santé de la plage, ça ne sert absolument à rien sur le long terme. Le problème fondamental, c'est l'érosion de la plage. Sur le court terme, on tranquillise la population mais c'est tout. Actuellement, il n'y a qu'une solution : le repli stratégique. Mais aucun maire n'est capable de mettre en oeuvre une politique de ce type."

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Les élus trégastellois se croiraient-ils plus forts que la mer ? Seraient-ils assez fous pour engloutir les finances publiques dans un bras de fer perdu à l'avance ? Ignorent-ils que la fière devise de leur commune (Krog e-barzh ! ), si elle vaut pour la barre du bateau qui fend la vague, vaut aussi pour la vague qui ronge inexorablement la côte ?... et non l’inverse.
Les résidences menacées à Tregastell sont un exemple de l’urbanisation galopante du littoral qui a prospéré avant que soit enfin adoptée la loi du même nom. Elles n’en sont pas anciennes pour autant : nos Anciens n'étaient pas fous : ils évitaient, eux, de construire dans les vallées inondables et sur les côtes exposées ou friables. Il aura fallu attendre la seconde moitié du XXème siècle pour que de présomptueux candidats à l'appropriation du littoral s'imaginent que les permis de construire que des pouvoirs publics peu soucieux de préserver les espaces naturels, leur accordaient alors, valaient pour assurance contre la force des éléments naturels.

Je ne me réjouis bien sûr pas de leur déconvenue. Mais ma compassion et ma solidarité vont en priorité aux victimes de plus grandes injustices. Il serait donc plus approprié que ces propriétaires en appellent, non pas aux subsides de leurs concitoyens de "l'arrière-pays", mais à ceux des compagnies d'assurance qui ont accepté de couvrir leur défi à la mer, afin qu'elles accompagnent désormais leur prévisible repli vers un point de vue moins « imprenable ».

Jean-Do ROBIN
Contribuable trégorois et climato non-sceptique.
21.02.2014