29 - Amalgamons

    Maître Knopp a fini de jouer au bois, résonnez musette ! Il nous revient sans gueule ni langue de bois. Juste une petite réprimande à propos du catastrophisme (cf plus bas sous le papier « Apocalypse now ») Pas le genre à t’envoyer des courriels courroucés dès qu’un mot ne lui plait pas, comme le faisait, il y a peu, sur un site Internet auquel nous collaborions généreusement, une petite cheftaine sadique en brandissant son fouet. Si encore elle s’était harnachée de porte-jarretelles, j’aurais pu lui répliquer « Merci Maîtresse ! Fouette-moi encore ! »
    Sur cette page de Bretagne, nous sommes en pays plus civilisé. L’acceptation de la contradiction est un signe de santé mentale. Mais bientôt viendront les robots. Knoppy sur le sujet en connaît un rayon. Et alors là, on ne répond de rien. Faudra ramper au doigt et à l'œil. Car le robot, lui aussi, est plutôt con.
JK 

    Oui. Je sens que je vais encore amalgamer. C'est mes lectures qui se télescopent, en fait. Qui s'entrecroisent, se mêlent et s'intriquent jusqu'à former le gloubi-boulga que voilà.
Au départ, j'ai lu un truc sur le salon « innorobot » et ensuite, tout s'est enchaîné...

    Technologie. Haute-technologie. Très-haute-technologie. Technologie spatiale. On nous apprend que de plus en plus de robots toujours plus performants vont progressivement remplacer les humains dans l'exécution de tâches ingrates, pénibles, dangereuses ou répétitives. Au commencement, les robots, c'était le truc des Japonais. Comme y z'habitent un archipel, la place est chère, et d'un point de vue culturel, ils n'avaient pas trop envie d'importer de la main d'oeuvre estrangère pour ramasser les poubelles et boulonner les bagnoles. Donc, robotisons, se sont-ils dit en Japonais. L'idée a été porteuse, tous les constructeurs bagnoliers du monde s'y sont mis, et même, ils sont allés produire avec des chaînes automatiques dans les pays à faibles coûts, là où l'heure-robote est moins chère.

     Mais alors maintenant, le plus beau, c'est que non seulement ces voitures modernes bourrées d'électronique ne sont quasiment plus construites par des humains, mais que les dernières innovations leur permettent de se conduire toutes seules, sans le chauffeur. Demain, pour rentrer des beuveries nocturnes, plus besoin de désigner un
capitaine de soirée ©, tout le monde pourra se biturer copieusement, titine est programmée pour rentrer au bercail en totale autonomie. Un peu comme les chevaux qui ramenaient la carriole à la maison quand pépé sortait du bistrot. Grosse déception pour la maréchaussée, tous les éthylotests à balancer. En cas d'excès de vitesse, le centre de paiement automatisé où sévissent déjà les robots-flics retirera le montant de l'amende directement par prélèvement automatique auprès du robot-guichetier de votre e-banque et après le retrait des douze points du permis, l'automobile est programmée pour s'immobiliser.
robot     De toute façon, y'aura plus tellement besoin de rouler pour aller bosser étant donné que d'autres robots assureront le job. On a commencé par les standardistes, les guichets, les caisses des supermarchés, et pis comme personne dit rien et que tout le monde laisse faire, le remplacement progressif des humains par des machines avance un peu tous les jours. Sur le même principe que l'aspirateur robot, on aura bientôt la charrue et la moissonneuse-batteuse guidées par drones et par satellites, il y aura donc aussi des robots-bouseux. Les aides-ménagères pour les vieux, pareil ! Ah, y z'ont vraiment pensé à tout !

    Ben... Peut-être pas à tout finalement ! On est quand même un sacré paquet d'humanoïdes sur cette petite planète ingrate, instable climatiquement et géologiquement, incapable de continuer à nous fournir indéfiniment et à titre gracieux le pétrole dont nous avons tant besoin. La salope ! Et alors, nous autres humains, qu'est-ce qu'on va bien pouvoir foutre quand les robots feront tout le boulot à notre place ? Quand les bagnoles décideront d'aller se balader toutes seules sans personne à l'intérieur, avec la complicité de la domotique qui lui ouvrira la porte du garage et nous enfermera dans le salon ?

    Oui, passque, si on pousse un tant soit peu le raisonnement, dans un premier temps, il restera peut-être encore des humains réparateurs de robots, mais même ça, à terme, finira par disparaître... Au final, on va donc se retrouver à quelques milliards de crétins à pas savoir quoi faire, vu que tout le boulot se fera tout seul, en mode automate. Si on n'arrive pas à mettre en place rapidement le Revenu Inconditionnel Universel, plus aucun humain n'aura assez de fric à dépenser. Faudra donc aussi inventer des androïdes pour aller en vacances, consommer, bouffer et chier à notre place, vu que de place, on n'en aura plus ! Déjà les pizzas se fabriquent toutes seules avec du faux-fromage, on peut les livrer quasi-instantanément par drone interposé, voire les matérialiser avec une imprimante 3D, la machine « cloaca », installation de l'artiste Wim Delvoye qui produit de la véritable merde, existe en plusieurs versions y compris une pour les végétariens, il n'y a plus qu'à la décliner en mode bipède si on veut l'humaniser un peu.

    Même la sexualité dite « récréative » devrait pouvoir bientôt abandonner le principe d'un partenaire de chair, d'os, d'orifices et de protubérances grâce à la sophistication des sex-toys. Donc, au train où vont les choses, dans quelques années, nous ne saurons plus strictement rien faire de nos têtes et de nos dix doigts (enfin, vingt, si on compte aussi les orteils...).
    Je ne sais pas bien vers où on va là, mais la question qui me tourmente le plus, c'est de savoir s'il y aura besoin d'un permis pour tirer sur les drones qui vrombiront au dessus de nos têtes ou si la justice retiendra le principe de « légitime défense »...

Gilles Knopp