291 - MERCI PATRON

Un film de François Ruffin, notre Mikael Moore

Le film n’est distribué que dans une cinquantaine de salles, mais ne le loupez surtout pas s’il croise dans vos eaux territoriales. C’est du marrant de bout en bout. Vous pouvez même amener vos prolos de voisins, ils ne s’emmerderont pas un quart de seconde.

Petit David contre gros Goliath. Goupil, le renard, coinçant la queue du loup Ysengrin dans l’étang gelé. Le Goupil c’est François Ruffin, malin en diable jouant les naïfs, attendri par son idole Bernard, achetant des actions de LVMH pour foutre le bordel à l’AG des actionnaires, se grimant pour piéger Arnault, roi du luxe. Arnault, vous savez ? Celui sur lequel Libé titrait « casse-toi pauvre con ! » lors de sa domiciliation en belgique. Celui qui, après le rachat crapuleux de Boussac –en 1985-, avait fermé boutique en délocalisant sa production textile en Pologne, ne gardant que Dior dans son escarcelle.

François Ruffin, fondateur du journal Fakir, se transforme sous nos yeux en Jérémie Klur, fils de deux licenciés de l’usine Boussac, criblés de dette, au bord de la faillite. Deux ouvriers qui jouent leur propre rôle et qui crèvent l’écran d’humanité joyeuse et gouailleuse.

LesKLUR

la famille Klur, père, mère et fils (le vrai)

Le chantage du « fils » Klur va permettre de piéger un commissaire des RG, envoyé par le groupe Arnault pour les calmer. « On va vous aider à payer vos dettes, mais surtout pas de vague sinon Arnault aura tous les licenciés de ses ex-usines de Valenciennes sur le dos. » Dans la foulée le père Klur obtient un chèque et un CDI à Carrefour. Avoir un CDI, l’Eldorado d’aujourd’hui ! Jamet député « socialiste », grand pote de Fabius et Hollande, par ailleurs membre du comité de direction de LVMH, se trouve impliqué dans le chantage et ne sait plus comment se dépêtrer sans écorner son socialisme de façade.

Pas de leçon. Pas de politologue, ni de sociologue pontifiant à l’écran. Du rire brut. Politique. Celui que préconisait Brecht. Celui de voir un puissant, déphasé du quotidien des gens, s’emmêler les pinceaux puis s’enfuir la queue entre les jambes. Le loup à la fin se retrouve à poil. Sa veulerie éclate au grand jour. Son appétence pour les artistes -avec musée au Bois de Boulogne, construit par Ghéry- apparaît pour ce qu’il est : une entourloupe destinée à se donner un vernis culturel pour camoufler une grosse arnaque économique... On pense aussi au musée Leclerc à Landerneau. Un rire qui ne change pas le monde, mais qui décomplexe.

L’art n’est pas au service des maîtres. Merci à François Ruffin de nous le rappeler.

JK (clown atomique)